Fiche n°3 - Le jeu pédagogique :
outil d’apprentissage et de développement de la communication
dans les organisations – contribution CENECO
Au service des animateurs et des participants en séances de formation, de sensibilisation ou encore d’information, le jeu pédagogique, conçu sur base d'une méthode rigoureuse et comme appui d'une démarche d’animation dynamique, peut être un remarquable outil de développement - quantitatif et qualitatif - de la communication dans l'entreprise. Son efficacité s'appuie notamment sur la pertinence des outils retenus et la qualité des personnes
choisies pour les mettre en oeuvre.
L’apprentissage par le jeu suppose le choix d’options pédagogiques qui privilégient les méthodes interactives, les processus inductifs et la dynamique de groupe.
La pédagogie du jeu requiert également que les participants soient prêts à sortir d’un rôle d’écoute passive et de stricte consommation de connaissances, à faire appel à leur propre expérience et à construire eux-mêmes et avec les autres un savoir issu de l’expérimentation et de l’échange.
On peut distinguer trois familles de supports ludiques utilisés en formation :
. les jeux de transmission cognitive,
. les jeux de table,
. les jeux de mise en situation
Les jeux de transmission cognitive sont des jeux qui permettent de matérialiser visuellement des notions et des mécanismes souvent présentés de manière abstraites ou perçus, du fait de leur complexité, comme relevant de la seule compétence de spécialistes. Ainsi, l’apprentissage des bases de la comptabilité générale ou de l’analyse financière est grandement facilité par le recours à des supports physiques – plans de jeu, jetons, plaquettes en carton - que les participants peuvent « toucher » et organiser sur base des instructions communiquées et en fonction de résultats à atteindre. Le jeu devient facilitateur d’appropriation de connaissances et de raisonnements.
Les jeux de table s’inspirent des jeux de cartes, comme par exemple le célèbre jeu de l’oie. Les joueurs avancent, à l’aide de dés, sur un parcours balisé, ils progressent par étapes sur des « cases événements ». Les sujets ou thématiques rencontrées au cours du jeu, au hasard des cartes tirées, illustrent des situations de la réalité sociale ou culturelle que chaque groupe de joueurs devra analyser et traiter. Les informations fournies et la prise de conscience de la complexité de certaines situations font l’objet d’échanges entre les participants sous la conduite d’un animateur dont le rôle essentiel est de gérer les échanges et d’apporter des éclairages particuliers en fonction des thèmes abordés ou des questions posées.
Dans les jeux de mise en situation, il s’agit pour les participants de se mettre dans la peau des acteurs réels, de vivre une situation de l’intérieur, de
la ressentir. Ces
mises en situation permettent à un groupe de vivre une situation qui simule certains aspects de la réalité sociale. C’est pourquoi on les appelle aussi “ jeux de simulation ” ou « jeux de rôles ». Les aspects de la réalité proposés à l’expérimentation des participants peuvent se référer à des situations vécues au travail ou en-dehors du travail, à des problèmes de coopération ou encore à des contextes de négociation.
Les jeux de mise en situation permettent, entre autres, de faire apparaître différents positionnements face à une même problématique. Les participants prennent conscience qu’il y a différents acteurs concernés par le problème et que ces acteurs ont des intérêts catégoriels, des points de vue, des perceptions de solutions,…Suit alors une phase délicate de négociation ou de conciliation des points de vue en présence et des stratégies d’action. On comprend ici que ce qui est fondamentalement en cause c’est la communication interculturelle qui doit favoriser la prise de conscience de la diversité des conceptions et des approches avec leur rationalité propre, leur légitimité, leur ouverture ou leur rigidité.
Pour l’exercice des jeux de rôles, il importe que les participants soient psychologiquement préparés et disposés à s’impliquer personnellement dans le jeu et surtout qu’un climat de confiance suffisant et réciproque existe dans le groupe et entre les participants et le formateur. Sans ce minimum de sécurité, les personnes ne pourront s’impliquer ni dans les exercices ni dans l’analyse qui suivra la phase de jeu. Car il sera demandé au groupe d’être capable de se remémorer ce qui s’est passé au cours de l’exercice, de se regarder agir avec suffisamment de recul pour tirer du jeu tous les enseignements potentiels qu’il recèle.
Comment s’organise un jeu de mise en situation ?
Il comporte, en général, trois phases : une période d’explication des règles du jeu, une période de description de la situation simulée, une période de jeu et enfin une période d’analyse et de réflexion sur le déroulement du jeu et les relations que l’on peut constater entre ce qu’on a expérimenté et la réalité sociale. Cette troisième phase peut se compléter par un apport de type théorique.
La démarche pédagogique
Quel que soit le thème ou la nature de l’apprentissage envisagé, la démarche pédagogique devra prendre appui sur des méthodes et un rythme d’apprentissage qui permettent aux participants de s’approprier progressivement et de manière active les éléments de contenu du programme proposé. L’utilisation de supports ludiques interactifs – jeux plateau, jeux d’association ou de découverte, mises en situation, réglettes, quiz, …- sera privilégiée et permettra aux participants d’associer efficacement connaissances et raisonnements.
L’animation devra donc veiller à assurer un bon équilibre entre les apports de connaissance parfois indispensables et leurs transpositions/illustrations dans la réalité de situations concrètes.
Pour quels résultats ?
Pour les destinataires, l'acquisition d'un langage commun et l'entraînement à un nouveau style de communication grâce à une démarche personnalisée et chaleureuse. Pour les animateurs et démultiplicateurs, la validation de leur aptitude à l'animation et à la communication sur des thèmes variés. Pour les responsables de l'opération l'identification des potentiels d'animation de la hiérarchie et la création d'un réseau interne de communication mobilisable sur d’autres projets. Pour l'entreprise, une meilleure efficacité de l'organisation, une plus grande réactivité aux changements.
Prendre conscience d’être un acteur à part entière dans un champ social, exercer sa capacité de se décentrer par rapport à des représentations naïves ou réductrices, s’ouvrir aux logiques de l’autre et entrer en convergence avec lui dans le respect des différences, voilà des compétences interculturelles importantes qui peuvent s’acquérir au cours de jeux pédagogiques adéquatement animés.
L’animation
L’efficacité pédagogique ne se mesure pas à ce que l’on a enseigné ou au volume d’informations que l’on a transmis mais à ce que les participants auront compris, retenu et, enfin, utiliseront.
Attitudes et comportements
L’animateur doit être avant tout à l’écoute permanente des interrogations et des réflexions des participants. En un mot, il doit être disponible.
Cette disponibilité sera effective sous trois conditions étroitement associées :
. L’animateur s’abstiendra de tout dogmatisme, de toute prise de position partisane ou de nature hiérarchique qui rendraient rapidement suspecte, pour les participants, la nature même de ses relations, voire les finalités annoncées de la réunion.
. Le respect de cette première condition renforcera la crédibilité indispensable de l’animateur qui prendra appui sur une réflexion et une préparation suffisante sur la matière et les thèmes abordés.
. Enfin, les relations entre l’animateur et les participants ne se situent pas uniquement sur le plan rationnel. Une grande part d’affectivité et d’enthousiasme influencera favorablement le « climat » de
la réunion. Il
ne faut pas animer une réunion par devoir, mais plutôt par désir personnel de communiquer et de faire progresser.
Le niveau de connaissance
C’est une des préoccupations majeures man
ifes
tées par les futurs animateurs non spécialistes des thèmes abordés. Une inquiétude légitime dans la mesure où notre système de référence habituel en matière de transmission de connaissances relie étroitement la compétence reconnue (ou supposée) à l’efficacité.
Il ne faut jamais oublier que l’objectif poursuivi n’est en aucun cas de favoriser une accumulation de connaissances mais de s’entraîner à une meilleure saisie et compréhension de l’information caractérisant les situations vécues, de près ou de loin, par les participants.
Cela dit, l’animateur possèdera une maîtrise suffisante du contenu de l’information à communiquer en se gardant toutefois de confondre son rôle d’animateur et de facilitateur avec celui, plus traditionnel (et confortable), de l’enseignant.
En résumé, le rôle de l’animateur consistera à « faire vivre » le groupe de participants, à faire progresser leurs niveaux de réflexion et d’élargir leurs champs de perception et d’intérêt.
La co-animation
La démarche de démultiplication d’actions de formation ou de sensibilisation fait intervenir des animateurs choisis dans l’organisation qui ne sont pas, le plus souvent, des professionnels de l’animation ou de la communication, et encore moins des experts des sujets à traiter.
La co-animation - binôme d’animateurs – peut s’avérer utile pour les raisons suivantes :
. Elle constitue une sécurité car elle permet aux animateurs de se répartir les tâches et au besoin de s’appuyer l’un sur l’autre. Le fait de choisir un co-animateur qui paraît complémentaire dans son style de relation ou pour son niveau particulier de compétences
ne constitue pas forcément un gage de co-animation réussie.
. Elle facilite le travail de préparation afin de se mettre sur la même longueur d’onde, de vérifier sa compréhension des différents contenus, d’organiser les prises de relais.
. Elle permet une réflexion couplée sur les objectifs à atteindre, sur le mode d’animation et sur les retours d’expérience.
Dans tous les cas, la co-animation favorise la dynamique du groupe par la variété des styles, des timbres de voix, des personnalités et est une source d’enrichissement car elle permet à chaque animateur d’améliorer progressivement sa manière d’aborder et de développer un sujet ou son mode de communication et d’échange avec les participants.
La bi-animation consiste à juxtaposer les interventions de chaque animateur qui se sont répartis le travail, les thèmes à traiter tout en s’interdisant d’empiéter sur le « territoire » ou le temps de parole de l’autre. Si elle peut se concevoir lorsque l’objectif consiste principalement à transmettre des connaissances, elle est peu indiquée lorsqu’il s’agit de favoriser des modes de réflexion ou de raisonnement autonome.
Les questions du groupe
Poser des questions est pour un participant la meilleure façon de montrer son intérêt et donc son niveau de participation à une séance de formation ou d’information.
Face à ce questionnement, parfois imprévu, l’animateur non professionnel peut éprouver une certaine crainte d’être mis en difficulté sur le fond et d’être pris en flagrant délit d’insuffisance.
La tentation est dès lors grande de limiter les opportunités d’échanges en accélérant par exemple le rythme de la communication ou en se réfugiant derrière des exposés techniques.
Pour conjurer cette difficulté, il convient de s’interroger sur la nature des questions les plus fréquemment posées et sur les manières d’y répondre.
Le premier type de questions prend la forme de « questions tests » posées généralement en début de réunion à un moment où chacun essaie de se situer par rapport au contenu de la réunion et par rapport aux autres participants : test de réaction des animateurs, test des réactions globales du groupe, test des opinions des autres.
Elles peuvent avoir pour objectif de se faire valoir, de « coller » l’animateur ou encore de de revendiquer un positionnement de leadership face au groupe. La meilleure réponse se trouvera dans la spontanéité et le naturel des réactions du ou des animateurs.
Le deuxième type de questions correspond à l’expression d’un nécessaire enrichissement du groupe par lui-même et fait dès lors partie intégrante de la démarche pédagogique :
. satisfaire une attente,
. chercher à comprendre ou à approfondir,
. remettre en cause un raisonnement,
. contribuer à faire avancer la réflexion.
Dans ces divers cas, il n’est pas toujours certain qu’une réponse factuelle soit la meilleure solution. L’animateur aurait peut-être intérêt à utiliser la question comme un tremplin pour élever ou recentrer le niveau du débat.
Les questions « hors sujets » ou qui anticipent des contenus qui seront abordés ultérieurement seront utilement « stockées » sur un tableau papier ; une mise au frigo temporaire avant d’être traitées opportunément à d’autres moments. En veillant toutefois à ne pas transformer le frigo en « congélateur », ce qui ne manquerait pas de décevoir ou de frustrer les participants.
La transcription des questions restera fidèle, autant que possible, à la formulation donnée par les participants. En cas de reformulation, parfois nécessaire, l’animateur veillera à obtenir l’adhésion sur celle-ci.
Jusqu’où faut-il répondre ?
L’animateur doit-il tout savoir ? Et faut-il à tout prix apporter une réponse ?
En premier lieu, il faut se méfier de l’excès de technicité. Il est en effet facile, pour ce faire plaisir ou parce que l’on se sent à l’aise sur la matière abordée, de se laisser entraîner dans un discours ésotérique ou de type « effet de manche » qui impressionne peut-être favorablement certains participants, mais de manière superficielle.
Il ne faut pas oublier que l’objectif essentiel n’est pas l’acquisition de connaissances mais l’entraînement à la réflexion et à l’échange. Il importe donc de maîtriser son savoir pour privilégier les attentes réelles du groupe, en fonction de sa composition et de ses attentes.
L’animateur n’est pas contraint à répondre à toutes les questions et il est préférable d’avouer une ignorance plutôt que de se lancer dans des réponses approximatives ou erronées. L’animateur aura toujours par la suite l’opportunité de transmettre par d’autres canaux (e-mail) l’information demandée.
La pédagogie de la communication est davantage dans le chemin pour parvenir à la réponse que dans la réponse elle-même.